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1916 : A quoi servait le ‘’Djidji Ayokwe’’, le tambour sacré des Ebrié que les français s’apprêtent à restituer à la Côte d’Ivoire, après plus de cent ans de confiscation ?

Dans le cadre de la restitution des biens culturels confisqués par la France à l’époque coloniale, la Côte d’Ivoire, (en accord depuis 2018 avec le gouvernement français et les gestionnaires de la culture ivoirienne, notamment le Dr Silvie Memel-Kassi, directrice générale de la Culture en Côte d’Ivoire), s’apprête à recevoir dans les jours à venir, le ‘’djidji ayokwe’’, le tambour parleur du peuple Tchaman, communément connu sous l’appellation d’Ebrié.

Ce tambour, long de 3,31 mètres et pesant 430 kilos, conservé à Adjamé au début du siècle a été confisqué par les colons français en 1916 et gardé au Musée du Quai-Branly à Paris depuis cette date. 107 ans précisément que le précieux objet sacré vit en ‘’captivité’’. Dans le cadre du mouvement de restitution des biens culturels, ce tambour sera enfin rendu à sa terre.

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Pour l’heure, l’objet est dans les laboratoires français pour une cure de réhabilitation avant de regagner la terre d’éburnie. Mais à quoi servait ce tambour pour que la France le confisque ? Avait-il une signification particulière dans la vie culturelle et coloniale du peuple Ebrié du début du siècle ?

Selon les documentations historiques sur le sujet, c’est en 1908 que la métropole (la France) nomme Angoulvant comme gouverneur de la colonie de Côte d’Ivoire. Dans le cadre de la fourniture de la main-d’œuvre pour la construction du chemin de fer qui part d’Abidjan vers l’intérieur du pays, il se heurte, de 1905 à 1910, à la farouche résistance de beaucoup de tribus ivoiriennes dont la plus vive fut celle des Abbeys, finalement mâtés dans le sang ; beaucoup d’entre eux, les plus récalcitrants, furent déportés en Afrique Centrale notamment.

Presque tous les peuples furent vaincus, presque, mais pas tous. En effet, les Ebrié, pour échapper au recrutement de leurs fils, usèrent du tambour parleur ‘’Djidji Ayokwé’’ comme instrument de communication.

En dehors de son rôle, selon Djagoua Guy, porte-parole des chefs de village Bidjan qui était de ‘’convoquer l’ensemble de la communauté à Adjamé lorsque d’importantes décisions devaient être prises comme des guerres’’, le Djidji Ayokwé servait aussi à prévenir les villageois de l’arrivée imminente des colons pour leur recrutement car, faut-il le préciser, le tambour était capable d’émettre sur plus de 20 kilomètres à la ronde. Ainsi, à leur arrivée, point d’Ebriés, donc point de recrues pour les travaux forcés car les Ebrié étaient toujours informés d’avance. Il était difficile pour les colons français de comprendre comment toutes leurs stratégies étaient sues d’avance.

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Sur la question des auteurs de la fuite du secret, aucune réponse précise n’est en notre possession mais il faut risquer la thèse d’un traître dans la tribu comme ce fut le cas partout ailleurs. Voilà comment, l’objet sacré fut saisi en 1916 et déporté dans un premier temps à Bingerville dans la résidence du gouverneur avant d’atterrir plus tard en France, au Musée du Quai Branly d’où il devrait revenir les jours à venir. Son retour ne sera qu’une juste reconnaissance d’un tort fait à la culture et à la mémoire d’un peuple ivoirien. Bonne arrivée chez toi ‘’Djidji Ayokwé’’

Diaman Emmanuel

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